Tattoo et moi

tatouage pissenlitMon tatouage ! Vaste sujet. Ce tattoo je l’ai en tête depuis quelques années. Et puis un cancer et toutes les ablations possibles. Un chapitre qui se finit ou que je veux voir se finir enfin et l’envie de garder malgré tout une trace de tout cela.

Pour le dessin ? Envie de symbole, de quelque chose qui s’envole. Et puis, et puis… quand j’avais une dizaine d’années une libellule s’est posée sur ma main, c’est con mais c’est une image que j’ai encore en mémoire tant visuelle que sensorielle ; cette sensation étrange où deux sens s’entrechoque : je la voyais, posée là, mais je ne sentais rien. Il y a une autre chose qui me poursuit : la fleur de pissenlit. Outre le fait que sa pullule dans mon jardin ce truc, je trouve que c’est tellement poétique, léger et beau. Il y en a partout chez moi : des cadres, une housse de couette, un sticker mural géant, une coque de téléphone, j’en ai même un sur ma carte bleue (….bon j’avoue avoir hésité avec M.POKORA torse nu mais je n’étais pas sûre d’assumer le fait de la dégainer au resto avec des collègues notamment ! ). J’ai hésité, parcouru Pinterest et Google Image, dessiné, recommencé, mis tous ces essais dans un tiroir pour les ressortir après plusieurs semaines…Et j’ai recommencé, hésité encore.

Décision prise : ce sera donc une toute petite libellule sur le bas du ventre. Mi-juillet je pousse la porte d’un tatoueur juste à côté du labo où je suis allée récupérer mes derniers résultats d’analyse et zou ! Rencard pris plus de  2 mois ½ plus tard.

J’alerte, j’informe évidemment le moooonde entier (….sauf mes très proches mais ça c’est une autre histoire !). Au milieu de l’été, devant une bière avec un collègue, plutôt bon dessinateur et par ailleurs prof de bio, je dégaine mon esquisse. Il sourit, trouve le dessin plutôt bien fait et ajoute « Oui, joli…donc, tu comptes te faire tatouer un insecte carnivore sur le ventre ? Un truc vorace qui bouffe des larves ? hum, oui, ben écoute… c’est ton ventre hein ! « . Je me vexe (évidemment), jusqu’à ce qu’il ajoute : « toi la nana libre et rebelle, tu collerais bien au concept de mauvaise graine : le pissenlit serait parfait. » Revirement de cap, on pose un pissenlit sur un coin de nappe et lorsque je préviens mon tatoueur par messenger  il m’annonce qu’il a eu un désistement et qu’il m’attend fin août.

Les réactions des autres personnes à qui j’en ai parlé ont été très variables et certains sont allés très, trop loin  à mon goût. Que les gens pensent que brusquement je ne deviens plus fréquentable parce que j’ai des tatouages ça m’est complètement égal et même plus, je m’en contrefiche comme de l’an 40 (pourquoi 40 d’ailleurs ?). Comme je l’ai dit je n’avais pas prévenu mes proches, notamment mes parents et mes enfants. A mère qui m’a téléphoné alors que j’étais allongée le ventre à l’air, j’ai menti, je lui ai dit que j’étais encore au boulot et que je la rappellerai plus tard ; ensuite elle ne m’a pas cru puis a fini par un tonitruant  : « olala, un tatouage ??? N’importe quoi !!! Tu veux ressembler à une camionneuse ou un biker ? ». Oui bon, physiquement je suis à un monde de ça mais si quelqu’un a envie de me taper dans le dos, si fort que j’en décolle de deux mètres et qu’il propose de me payer une pinte, oui une pinte,  50cl,  de Leffe Brune et ce même dans un PMU pourri : why not (laissez moi un mess en privé). Bref ma mère n’aime pas les tatouages, soit…qu’elle ne s’en fasse pas ! Je ne pense pas que ça remette en doute l’amour et l’estime qu’elle me porte (maman si tu passes par là, tu as un droit de réponse). Mes filles quant à elles sont rentrées alors que j’étais dans la salle de bain en train de décoller la compresse qui protégeait mon nouvel ornement. La grande est restée bouche ouverte avant de demander si je l’avais dit à ma mère ! La petite a lancé un « haaaaan délire ! C’est un vrai ? C’est pour toute la vie ? Et t’as eu mal ? J’pourrai venir avec toi la prochaine fois ? Et tu … ». Un vrai événement familial ce truc !

 

Et, malgré ce que j’ai entendu : non, je n’ai pas fait un tatouage pour suivre cette nouvelle mode, j’ai fait un tatouage pour ce qu’il représente, pour moi. Avec un motif qui a une signification toute personnelle, qui fait partie de ma vie, alors non, pas de regrets, merci. Tout ça pour dire que oui, je suis biiiiiien consciente que c’est pour toute la vie. Si certains le font sur un coup de tête, par mode, ce n’est heureusement pas le cas de tout le monde. Alors merci de vous faire du souci pour moi, mais les gens tatoués savent réfléchir par eux-mêmes, vous savez ? Pas besoin de votre avis, de votre morale. Personnellement ça rentre dans une oreille, ça m’agace vaguement selon le jour et ça sort par l’autre ; je suis une adepte du « oui-oui-oui » quand je n’ai pas envie de débattre, ça fait gagner vachement de temps, ça économise de l’énergie, de l’agacement et du temps.

Nous sommes en 2016, j’estime avoir le droit de faire ce que bon me semble de mon corps. C’est mon corps. Ma vie. Mes choix. Alors par pitié gardez toutes ces remarques qui entrent dans le champ du « socialement correct », vous voyez tous ces trucs auxquels je suis allergique :

(Lire avec une petite voix pleine de compassion, tête penchée sur le côté ) « oooohhh c’est tellement dommaaaage tu es teeeeellement jolie ». Alors, très franchement je me fiche de ce que toi, là, avec ta tête penchée sur le côté, tu penses de mon physique. Et je te propose de revoir les bases de la politesse : même mes mômes savent que, non, on ne peut pas dire tout ce que l’on pense et ce dès lors qu’on a passé l’âge de 3 ans. Et puis quel est l’intérêt de ce type de remarque ? Tu attends que je sois triste ? Tu penses que suite à cela je vais foncer chez le premier dermato pour lui laisser 1500€ dans des séances de laser pour faire disparaître le truc ? J’avoue que je ne comprends pas… Je ne vis pas ma vie pour toi, je me fiche que ce que tu penses de moi !

Il y a aussi le « hannnn un vrai tatouage ? mais tu as pensé à quand tu seras vieille ? » Heu ben…ce tatouage est un truc ultra important pour moi, il fait partie de mon histoire maintenant et donc de moi. Non je ne pense pas à la tronche qu’aura ma fleur de pissenlit dans 40 ans, pas plus que ça, du moins. Est-ce que je te demande si tu penses à quoi va ressembler ta peau dans 40 piges ? Par ailleurs je n’aime pas mon petit doigt de la main droite (pas tout à fait rectiligne) et pourtant je vais bien devoir finir ma vie avec lui aussi.

Le « N’importe qui est tatoué aujourd’hui » ! Je réponds bravo ! Voilà la réelle victoire de cet art, celle d’être devenue accessible à tous.

Quant au « Tatouage… nouvelle mode », ça me fait rire !  Le tatouage est plus ancien que la plupart des religions établies, de quelques milliers d’années pour certaines. Ce qui est nouveau, c’est la sortie du placard, mais nombre de nos ancêtres qui ont combattu dans les tranchées sont revenus de guerre avec de l’encre dans la peau.

Ce tatouage a mis autre chose en évidence, un nouveau rapport au corps, à mon corps, ce corps que j’ai eu beaucoup de mal à réinvestir après mes opérations. Pendant un mois il faut le chouchouter ce tattoo : le laver, délicatement à la solution antiseptique, l’enduire de crème cicatrisante, l’hydrater, le recouvrir, le protéger, ne pas le faire tremper dans un bain ou à la piscine, essuyer les points de sang qui auraient pu suinter, changer les compresses sur lesquelles l’encre a dégorgé, le protéger des frottements, il faut le toucher, retoucher ce corps que j’ai eu du mal à me réapproprier.

Éternelle question et généralement la première qu’on vous pose : est-ce que ça fait mal ?…huum oui, bien sûr : on n’oublie pas que c’est une petite aiguille qui transperce la peau pour y injecter de l’encre ! Moi j’y suis allée en me disant que j’allais morfler surtout à cet endroit sur le bas du ventre même si je sais que je suis très peu sensible à la douleur. Mais cela fait partie du geste, du symbole  (même si je suis ravie d’avoir eu une péri pour la naissance de mes 2 enfants, hein ! ).Et………….

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Je n’ai rien senti, mais genre rien de rien, pas du tout, rien, nada, quedalle, limite j’aurais pu m’endormir si le tatoueur ne m’avait pas causé. Je pense donc que c’est très personnel, peut-être que si j’y était allée dans un autre état d’esprit, peut- être que si je n’avais pas parlé avec le tatoueur pendant toute la séance ça aurait été différent, peut-être que…

 

Conseil d’une novice aux novices

Le problème avec le premier tatouage, c’est que quand tout est fini, il y a un petit moment où on relâche la pression, où on admire le truc en se disant que « ouuuuuuf c’est fini et finalement c’était pas si terrible », ce moment où on est un peu à côté de ses pompes. Mais attention, c’est à ce moment ton tatoueur préféré te balance des infos essentielles mais comme je suis sympa je vous fais un résumé qui t’évitera de lui envoyer 652 messages parce que tu ne l’as pas écouté une seule seconde ! Alors pour résumer voilà ce qui est normal, voila ce que tu dois savoir  :

  • Un tattoo ça saigne, plus ou moins, parfois pas franchement mais tu risques de trouver au moins de petites croûtes à la surface de ton tattoo tout frais. Tu le laves tranquillement, sans frotter et ça va se décrocher tout seul.
  • Un tattoo ça dégorge, pendant quelques jours la petite compresse que tu mets pour éviter les frottements en attendant que ça cicatrise, cette petite compresse va se retrouver avec une jolie impression de ton tatoo en négatif.
  • Un tattoo ça n’aime pas nager pendant un petit mois, tu peux le mouiller mais tu ne le laisses pas macérer dans un bain ou à la piscine.
  • Un tattoo ça s’hydrate régulièrement surtout les premières semaines.
  • Un tattoo c’est un peu une cicatrice malgré tout…donc tu ne le mets pas au soleil jusqu’à cicatrisation complète et ensuite tu le protèges avec un bon indice 50, tu le soignes !
  • Un tattoo c’est une cicatrice (ok je l’ai déjà dit), tu te souviens quand tu te prenais des vols planés lorsque tu étais enfant et que tes genoux morflaient ? Et ben c’est pareil, pendant qu’il cicatrise il va te démanger ton tatoo mais attentiiiiiiion tu as interdiction formelle de te gratter ! Il va peler aussi un peu, le temps que le renouvellement cellulaire se fasse totalement.

Pour conclure…

Pour moi ce tatouage est un moment de ma vie que j’ai voulu marquer ou graver, c’est très personnel. Je comprends que pour d’autres ce soit un truc purement esthétique, une œuvre d’art et j’ai envie de dire : tant mieux, il s’agit de votre propre corps, vous en faites ce que vous voulez ! Mais je pense quand même qu’un tatouage nécessite un laps de temps de réflexion. Les goûts changent, vont et viennent, prenez le temps de dessiner, de retravailler, de l’oublier, d’y revenir 1 mois plus tard et de vous décider ensuite. Posez-vous les bonnes questions et surtout, faites-le pour vous-mêmes.

Chaque tatouage nous rend unique et nous permet de trimbaler nos souvenirs, nos œuvres d’art ou nos histoires sur notre corps 365 jours par an. Se faire tatouer, c’est s’assumer : peu importe le dessin, peu importe la raison, peu importe l’envie, peu importe le moment, peu importe l’endroit … Le seul conseil, la seule chose que je pourrais éventuellement peut être (vous avez vu toutes les précautions  😉 ) conseiller c’est d’éviter les « zones de communication » c’est-à-dire le visage et les mains mais chacun fait ce qu’il veut !

Dans certains milieux, quand on a eu une certaine éducation, se faire tatouer c’est mettre un pied dans la marge, c’est attirer le regard, c’est ébranler les préjugés, les vôtres et ceux de vos proches. Mais c’est souvent être soi-même…enfin ! Si l’idée vous plaît, je vous encourage à y aller.

I need another tattoo

5 réflexions sur “Tattoo et moi

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