
Il y a des jours où on resterait bien sous la couette. On s’est couché tard, on a mal dormi, on a rêvé que Marc Jacobs mettait le feu à notre dressing tellement il était dépité, on a rêvé que notre plus grand rêve ne se réaliserait pas
Devant la glace, on se demande qui est cette personne aux yeux cernés. Bah, après deux mugs de café (thé / Ricoré / grog… selon le rituel de chacun), ça devrait aller mieux.
En fait, pas trop. Les jours-sans sont cruels. Ils nous transforment en… rien. On pourrait aussi les appeler les jours riennammettre. Ces jours-là ne sont pas toujours programmés dans notre agenda. Ils nous tombent dessus sans crier gare. Sale tête, cheveux en berne, corps ramolli, moral qui va avec, penderie vide ou c’est tout comme…

Comme on n’a pas toujours la possibilité de se recoucher, on peut au moins être doux avec soi. C’est le minimum. Et pour ça on a tous nos petits trucs : de l’apéro phone avec des copines aux gâteaux au chocolats dans le sac à main en passant par la “panoplie jours-sans” dans laquelle on se glisse comme dans un pyjama.
Hier matin par exemple, j’ai quitté ma maison en total look doudou. Je sortais d’une semaine prise-de-tête, j’avais peu dormi, ma fille était malade, moi aussi, j’aurais aimé entrer dans ma bulle et me pelotonner dans un coin avec des chocolats et un bouquin qui-fait-du-bien ; sans conteste, ce n’était pas un jour à enfiler une paire d’escarpins dotées de 11 centimètres de talons ! Mais, pas de chance, il y a la vraie vie, vous voyez ? Mais siii, je vous assure il y a une vie dehors, même ces jours-là.
En me regardant dans la voiture sur le chemin du boulot, je me suis dit que ma tenue était à la fois très confortable et vraiment peu classe, ce jour-là j’avais eu envie de douceur quand j’ai passé la tête dans mon dressing. Entre mon cuir qui me donnait un air d’ado et qui avait fait 10 hivers, mon jean taille basse et tellement stretch que je l’ai porté jusqu’au jour de mon dernier accouchement, -il y a presque 8 ans, donc-, mon pull ultra épais, doux et surtout oversize ainsi que mes rangers noires je ne portais pas forcément mon look le plus élégant mais je m’en fichais. J’avais juste besoin d’une seconde peau… Mais la journée avait intérêt à se passer sans rendez-vous trop important !
Dans ces cas-là (sauf cas de force majeure) c’est typiquement ce que je conseille : on ne se force pas : mieux vaut choisir des vêtements dans lesquels on se sent en sécurité.
Pour éviter l’air « en friche » les jours où je n’ai envie de rien mais qu’il faut bien sortir, j’ai trouvé un truc génial : quand je me sens bien dans une tenue (c’est-à-dire invincible), je me prends en photo avec mon portable. Du coup les jours sans (inspiration / motivation), je suis contente de piocher dans mon look-book (j’me la joue, hein ?!). En tout cas ça me donne des idées d’associations pour les jours où je sèche. Et la merveilleuse sensation de me coucher le soir en sachant comment m’habiller le lendemain !
C’est vrai que certains jours, on n’a pas envie de croiser des regards renfrognés, ni de se faire bousculer. Heureusement, parfois, il suffit d’un mot gentil inattendu, d’un appel, d’un texto ou d’un sourire croisé dans un couloir pour se remettre debout.
Bah justement, aujourd’hui jour sans (oui encore ! ), on se secoue un peu : temps maussade, placard fatigué de voir ma mine désinvolte, yeux cernés et cheveux « j’ai perdu mon lisseur ». Ce n’est pas aujourd’hui que je vais exhiber ma tenue de misère.
Hop, on fait vite un distingo entre le vêtement doudou et le vêtement fétiche. Le premier a pour unique fonction de nous saper confortablement.
Alors que la fonction principale du vêtement fétiche c’est quand même de nos mettre en avant, nous, notre corps de rêve : un truc ultra narcissique. Bref on est un peu dans le registre de la recherche d’autosatisfaction ! Moi, c’est ma veste noire, dès que je la porte, je me sens séduisante, sûre de ma féminité, sûre de moi. Oui, cette veste me donne de l’assurance.
La question ne se pose pas : cette pièce-là, nous l’aimons depuis longtemps, sans restriction. Avec elle, nous nous sentons bien, nous nous sentons « nous ». Qu’elle nous mette en valeur ou non importe peu, tout comme le regard et les commentaires d’autrui : elle nous appartient. Elle est aussi l’héritage du doudou de notre enfance, dont la présence nous rassure et nous sécurise. Par son aspect, son toucher, et surtout son contact doux sur la peau, elle rappelle ce moment de notre construction personnelle où nous avions un lapin, un ours en peluche, un bout de drap, de couverture…, un objet transitionnel en langage psy, nous reliant à notre mère et nous permettant ainsi de surmonter les premières séparations. Plus tard, le vêtement doudou reproduit notre rapport à l’éloignement, aux absences plus ou moins surmontées. Plus tard, à l’adolescence par exemple, les vêtements doudous peuvent être utilisés à un moment particulier de la journée, comme le réveil, le coucher, ou simplement lors d’un moment de solitude ou de concentration sur un travail important.

Finalement, c’est le regard des autres qui me pousse à renouveler ma garde-robe. Si je passais mes journées seule, je tournerais avec mes deux jeans chouchous et mes trois cachemires les plus doux (donc les plus vieux). Ca m’irait très bien, mais ça serait quand même un peu triste. Et puis ça m’ôterait, chaque weekend, le plaisir de retrouver ces amours de vêtements qui ont vécu.
On a tous une tenue dans laquelle on se sent comme dans un pyjama et qui nous ressemble.
Le pull angora-qui-fait-éternuer (et rigoler) d’Anne Sinclair, le chapeau de Mme de Fontenay, le slim gris de Kate Moss, les robes années 20 de Vanessa Paradis, les santiags de Lou Doillon, les lunettes de Woody Allen, les ballerines d’Ines de la Fressange, les solaires de Lagerfeld, les chemises de bûcheron de Thierry Richardson, les robes folk de Nicole Richie, les babies d’Alexa Chung, le chèche de Yaya, les Doc Martens de Catherine Ringer.